La générosité des Belges : cinq types de contributions
13/12/2025 - La générosité des Belges est alimentée par minimum cinq types de contributions : dons et legs des particuliers, recettes générées par des événements de collecte, ventes ‘au profit de’, mécénat d’entreprises.
Reconnaissons-le, difficile de retracer avec précision l’évolution de chaque composante de la générosité publique.
Notamment parce que la comptabilité analytique des acteurs de la collecte n’est guère soumise à une obligation de publication détaillée, mais aussi parce que les organisations confondent souvent au sein d’une même rubrique le produit des événements de collecte, les dons des particuliers et le mécénat financier des entreprises.
Par ailleurs, si le SPF Finances publie quelques chiffres-clés concernant les dons qui bénéficient d’une réduction fiscale, on ne dispose guère de statistiques officielles relatives aux legs en faveur de causes d’intérêt général.
C’est dans ce contexte difficile que le Baromètre de la Générosité édité par le Fundraisers Forum a choisi d'analyser chaque année les rapports financiers de nombreuses organisations caritatives, dans le but de dégager d'éventuelles tendances significatives concernant l’évolution des dons et des legs.
Nous publions ci-dessous le premier d’une série d’articles concernant la nouvelle édition de ce Baromètre, relative résultats comptabilisés sur l’année 2024.
Stabilisation de la générosité en 2024, grâce à l’apport des legs
Les données collectées par notre Baromètre sont issues en majorité d’organisations caritatives affiliées à l’asbl Récolte de Fonds Ethique ou la Fondation Donorinfo, ainsi que de quelques autres grandes structures (tel Cap48/Viva for Life, Kom op tegen Kanker, etc.).
La première édition de ce Baromètre 2024 concerne 241 organisations ont collecté 568 millions d’euros en 2024, soit 68% de dons et 32% de legs. Nous espérons y rajouter plusieurs dizaines de résultat d'ici mars 2026.
Précisons que les recettes issues des événements de collecte (ventes, galas, défis sportifs solidaires) ne sont - sauf exceptions - pas intégrées dans notre analyse, pas plus qu’elles ne le sont dans les statistiques du SPF Finances dont mention en fin d'article.
Or l'importance de ces recettes n’est pas négligeable, surtout dans le segment des petites associations.


L’année 2024 s’est clôturée pour notre échantillon de 241 organisations sur une hausse des legs (+3%) et un tassement des dons (-1%), soit au total une stabilisation des ressources issues de la générosité publique.
Un résultat inquiétant si on tient compte de l’inflation moyenne en 2024 (4.3 %). Cette année a toutefois également connu de belles réussites, telles les campagnes Télévie, Cap 48 et Viva for Life, ainsi que dans le Nord du pays De Warmste Week de même que Kom op tegen kanker.
Comparaison 2023-2024 : évitons les conclusions hâtives
Il serait hasardeux de formuler des conclusions hâtives sur base de l’évolution de la générosité au cours des deux années 2023-24, fut-ce parce que l’apport des legs subit souvent de fortes variations annuelles.
Notons par exemple que l’étonnante performance enregistrée en 2024 dans le segment des petites organisations (voir tableau A3 ci-dessus) découle d’un seul legs particulièrement exceptionnel.
On observe par ailleurs que la diminution globale des dons enregistrée dans notre échantillon sur l'année 2024 est fort influencée par une donation exceptionnelle qui avait été comptabilisée l’année précédente (tableau A2 ci-dessous).

Concentration des dons et des legs
Les résultats de l’année 2024 font état, comme auparavant, d’une forte concentration des dons et des legs au sein d’une cinquantaine de grandes structures.

Cette forte concentration est pour partie sur-évaluée dans notre analyse, car les très nombreuses petites structures actives en levée de fond - soit un total de plus de 2.600 associations reconnues par le SPF Finances, et bien d'autres - sont fortement sous-représentées dans notre échantillon.
2019-2024 : croissance des dons (+18%) plus réduite que la hausse des legs (+32%), et inférieure à l'inflation
A l’évidence l’évolution de la générosité des Belges gagne à être évaluée sur une base pluriannuelle, ce qui permet notamment de lisser sur une longue période les fortes variations annuelles des legs.
Analysée sur base d’un échantillon restreint de 221 organisations, nous n’oserions pas affirmer sur base du Tableau 4 (ci-dessous) que l’évolution des dons aurait été supérieure à celle de l’inflation sur la même période.


Les données relatives à la période 2019-2024 font apparaître une croissance des dons (+18%) bien plus limitée que la hausse des legs (+32%) :


Comme indiqué plus haut, les recettes issues des legs subissent de fortes fluctuations annuelles. En témoigne par exemple le legs exceptionnel dont bénéficia en 2024 une petite association.
Sur le long terme, étroite corrélation entre total des dons et progression des legs
Au niveau des organisations analysées individuellement notre Baromètre constate une étroite corrélation entre le total des dons – bon indicateur du nombre de sympathisants fidélisés par l'organisation – et celui des legs.
En 2024 dix grandes structures ont bénéficié ensemble d’un montant de 123 millions d'euros issu des legs.
S’il est bien plus rare que de petites organisations en bénéficient également, on observe néanmoins que le pourcentage de croissance de ce segment est assez comparable à celui des grandes structures. Parmi les situations tout-à-fait exceptionnelles, citons le cas en 2024 d’une modeste association soutenue par ses donateurs à hauteur de 90.000 euros, qui s’est vue attribuer un legs de 4,1 millions d’euros.
Rappelons enfin que les causes mobilisées sur la santé des Belges – telle la Fondation contre le Cancer, – bénéficient d’un surcroit de sympathie des testateurs. Il en est de même des refuges pour animaux et d’autres initiatives dédiées à la protection des animaux domestiques, tel GAIA.
Cette préférence, qui reflète les préoccupations d’une population vieillissante, est également observée dans d’autres pays européens.
Les causes les plus populaires
Le classement des causes les plus populaires en 2024 est quasi inchangé.
Il place toujours en premier lieu la solidarité internationale (44% des dons et 27% des legs), suivie par les projets ‘santé’ développés en Belgique (handicaps, maladies, recherche médicale) : 27% des dons, 49% des legs. La solidarité de proximité (solitude, précarité, jeunes en difficulté) recueille 15% des dons et 9% des legs, bien avant la nature et l’environnement (9% des dons et 8% des legs).
Fondation Roi Baudouin
Un panorama complet des acteurs de la collecte devrait rendre compte de la mobilisation de la générosité organisée par d’autres grandes structures, tel nombre de fonds ainsi que diverses Fondations, souvent affiliées la Fédération belge des Fondations.
Mentionnons notamment l’impact majeur de l’action philanthropique déployée par la Fondation Roi Baudouin.
Notre Baromètre prend en compte les dons et legs versés en faveur des projets de cette Fondation, soit 7,4 millions d’euros (dons et legs) en 2024.
Cette institution assure cependant également la gestion d'autres nombreuses initiatives d’intérêt général (nationales et internationales) qui sont initiées par des donateurs belges, européens et internationaux.
En 2024, ces initiatives ont été soutenues à hauteur de 212 millions d’euros.
Statistiques du SPF Finances : analyse de Donorinfo
Il est bien évidemment utile de comparer l'évoltion de la générosité en faveur des 241 organisations de notre Baromètre avec les données officielles du SPF Finances.
Ces dernières, qui concernent l’évolution globale des dons liés à une réduction fiscale, font état d’une forte croissance des dons en 2020, suivie de plusieurs années de relative stabilisation jusqu’en 2024 (visuel ci-dessous).
Une récente analyse de la Fondation Donorinfo, basée sur ces données du SPF Finances, établit que l’augmentation globale des dons, soit +38% sur la période 2019-2024, s’est avérée supérieure à l’inflation cumulée sur la même période, soit 23%.

Source : Fondation Donorinfo
Notons que les statistiques officielles rendent compte d'une progression des dons pour le moins exceptionnelle en 2020, à l'évidence bien supérieure que la croissance observée pour cette même année dans l’échantillon des 241 organisations analysées dans notre Baromètre de la Générosité.
Attestations fiscales
Le total des attestations fiscales émises pour les revenus déclarés en 2024, soit 516 millions d’euros selon le SPF Finances, est en léger recul de 1,46% par rapport à l’année précédente. Un résultat qui semble causé par la diminution du mécénat d’entreprises (- 9%).
Les quelque 2.650 organismes agréés par le Ministère ont émis 2,37 millions d’attestations en 2024. Un chiffre à manier avec précaution, car un même donateur peut avoir bénéficié de plusieurs attestations.
Le nombre d’attestations émises est en diminution de 5.6% par rapport à 2023 et n’a plus augmenté depuis 2020. Preuve qu’en Belgique, comme dans certains pays voisins, le secteur associatif peine à mobiliser de nouveaux donateurs.
HoGent : Baromètre des legs
Les sources d’information concernant l’évolution de la générosité des Belges ne sont guère nombreuses. On s’en voudrait de ne pas citer les chercheurs de HoGent, auteurs d’un Baromètre des legs édité sur base annuelle.
Leur dernière enquête a identifié 169 organisations qui ont bénéficié ensemble en 2024 de 892 legs, pour un montant de 215,2 millions d’euros.
L’étude de HoGent constate pour la deuxième année consécutive une légère baisse des contributions issues des legs.
Les chercheurs de HoGent publient des chiffres particulièrement impressionnants concernant le pourcentage de legs par association, ainsi que sur les recettes moyennes qu'elles produisent. Il convient de rappeler que ces résultats sont directement influencés par une forte sur-représentation de grands acteurs de la collecte dans leur échantillon.
L'analyse réalisée par l'équipe de Donorinfo est disponible en ligne au départ du lien suivant. Elle propose notamment, concernant la période 2015-2024, une comparaison de l'évolution de la générosité par rapport à l'indice des prix.
(source : Fondation Donorinfo)
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